Découvrez tous les secrets de l'industrie des jeux de société en lisant ce livre !
1- Vous êtes le fondateur du site JeuxSoc.fr. Pourriez-vous nous raconter votre parcours personnel et les débuts de votre projet de site ?
François Haffner : C’est tout à fait par hasard que j’ai créé JeuxSoc. Vers la fin du siècle dernier, ayant découvert Internet et particulièrement le web, je me suis intéressé à la relative facilité d’y publier des pages. Le langage de programmation, le fameux HTML, à la fois simple et très structuré, me rappelait mes pratiques professionnelles de programmation : j’ai en effet été un temps analyste-programmeur, au tout début des PC IBM. Pour m’essayer à la conception d’un petit site Internet, il me fallait un sujet. J'ai décidé de me consacrer à la trentaine de jeux qui traînaient sur mes étagères : des titres comme Ave César, Le Lièvre et la Tortue, Business ou Richesses du monde. J'ai ainsi repris goût au jeu de société et me suis mis à arpenter les vide-greniers, à la recherche de nouvelles boîtes. Leur nombre a dangereusement augmenté. Je me rappelle encore avoir promis à ma compagne de me limiter à 365 ! Aujourd’hui, je suis un peu dépassé par la taille de ma collection. Par bonheur, j’ai une grande maison et une municipalité bienveillante : elle laisse à ma disposition une ou deux pièces, dans le local où nous nous réunissons pour jouer, avec mes amis du club Rêves de Jeux.
2- Pourriez-vous nous expliquer comment vous vous organisez pour la gestion de votre site ? Quels sont les développements que vous mettrez en œuvre dans les prochains mois pour continuer à améliorer JeuxSoc.fr ?
François Haffner : Longtemps, JeuxSoc a été géré entièrement à la main. Chaque nouveau jeu nécessitait de modifier une foule de pages : la chronique, bien sûr, mais aussi les informations sur les auteurs, éditeurs, caractéristiques, thèmes etc. C'était devenu une véritable usine à gaz. Je savais qu'un jour ou l’autre, je devrais transformer le site à l’aide d’une base de données et d’un langage de programmation. Mais je reculais devant l’énormité de la tâche. Finalement, ce sont les hasards de la vie qui m’ont permis de franchir le pas. En arrêt-maladie pour plusieurs semaines, j'ai décidé de mettre ce temps à profit pour réécrire complètement JeuxSoc qui, à l’époque, comptait déjà 3000 jeux. Une chute suivie d’une fracture du bras, un an plus tard, a été l’occasion de continuer cette réécriture. Aujourd’hui, le site est basé sur une architecture mixte : les chroniques sont rédigées au format HTML et toutes les autres pages, auteurs, éditeurs, thèmes etc., sont programmées en PHP, avec une base de données MySQL. Il m’est dorénavant très facile de faire évoluer JeuxSoc selon mes envies ou celles des internautes, s’ils parviennent à me convaincre de la pertinence de leur proposition. La création d’une fiche pour un nouvel auteur ou éditeur est pratiquement instantanée. La création d’une nouvelle classification ne me demande que quelques minutes. Je peux ainsi me consacrer au travail incompressible, à savoir prendre des photos, les mettre en forme, écrire les chroniques et, bien sûr, jouer ! (En principe, avant d’écrire une chronique, c’est mieux !). Même si je reste le principal maître d’œuvre du site, je ne suis plus tout seul. Des amis m’épaulent. Mon ami Bruce, professeur des écoles, rédige de plus en plus régulièrement des chroniques, essentiellement sur les jeux à destination des jeunes joueurs. Mon ami Paul corrige souvent mes fautes, et me signale les erreurs de programmation que je laisse traîner. Je remercie particulièrement Ivy qui fait un travail de fourmi en corrigeant systématiquement, chaque semaine, toutes les chroniques du site, chassant impitoyablement fautes d’orthographe, de conjugaison, de typographie et de ponctuation. C’est à elle qu’on doit d’avoir un site aussi « propre ». Pour les améliorations de JeuxSoc, je reste à l’écoute. Il me semble cependant que l'interface est assez complète, avec de multiples possibilités de visites. C'est un site où il est facile de se promener. Du moins je l’espère.
3- Pourriez-vous nous donner quelques chiffres sur la fréquentation de JeuxSoc.fr ? Quelles furent les couvertures médiatiques dont vous avez bénéficié en 2009 ?
François Haffner : Les chiffres de fréquentation de JeuxSoc sont en progression lente depuis deux ou trois ans. D’après les statistiques fournies par mon hébergeur, OVH, JeuxSoc reçoit chaque jour aux alentours de 5000 visiteurs, qui consultent entre 40 000 et 50 000 pages. Ces valeurs sont multipliées par deux ou trois aux alentours de Noël, je me demande bien pourquoi ! Le record de fréquentation est dû à une circonstance inattendue. Lorsque le nom du nouveau compagnon de Ségolène Royal a commencé à circuler, j’étais l'un des rares à parler de lui sur la toile. De façon tout à fait fortuite, puisqu'André Hadjez a été un temps éditeur de jeux de société. Pendant deux jours, le nombre de visiteurs a littéralement explosé, entre 10 et 20 fois la normale ! Ma volonté est de garder le site libre de toute publicité, afin de conserver mon indépendance éditoriale. JeuxSoc est avant tout une passion qui me coûte du temps, et de l’argent. J’ai par ailleurs un vrai métier qui me fait vivre, heureusement. Je me réjouis bien sûr d’avoir un grand nombre de visiteurs, c'est un peu la récompense de mon « travail » ludique. Mais je ne cherche pas à tout prix de couverture médiatique. Être le premier à parler de tel ou tel titre ne m’importe pas. Si le jeu est vraiment bon, il sera encore disponible dans deux ou trois mois. J’ai moi-même été avide de nouveautés, mais j’ai pris du recul : chaque mois apporte en effet son « jeu du siècle », chassant « le jeu du siècle » du mois précédent… De ce fait, on trouve de moins en moins de nouveautés brûlantes sur JeuxSoc. Il faut dire que j’ai plus d’un millier de jeux en attente de chronique : je ne vois donc pas d’urgence à entrer chaque semaine les derniers titres à la mode.
4- À titre personnel, que pensez-vous de l'univers français de la création de jeux de société ?
François Haffner : Je ne m’intéresse pas tant à l’univers français qu’à l’univers francophone des jeux de société. Il y a aujourd’hui tellement de jeux qui paraissent chaque mois, que je crois qu’on peut se limiter aux publications en français - et y trouver largement son bonheur. Certes, il manquera la dernière nouveauté germanique ou étatsunienne, mais si le jeu est vraiment bon, il ne tardera pas à sortir en français. Il existe dans la francophonie de nombreux auteurs talentueux, qu’ils soient français, luxembourgeois, belges, suisses ou québécois. Malheureusement, tous les titres, même bons, ne peuvent pas être publiés. Je regrette qu’il n’existe pas de petite structure d’édition capable de sortir un jeu à quelques centaines d’exemplaires, tout en restant à un tarif abordable pour le public. Mais surtout, il faut déplorer la pauvreté de l’offre de distribution en France. Il existe deux ou trois distributeurs « obligés », dont les marges et les conditions de vente ne permettent pas la diffusion des jeux des nouveaux créateurs. Verra-t-on un jour l’émergence d'une « coopérative des créateurs associés » ?
5- Quelles sont les mécaniques et les jeux que vous aimez le plus ? Quels seront, à vos yeux, les titres qui vont cartonner dans les 6 prochains mois ?
François Haffner : Mes préférences personnelles vont vers plusieurs types de jeux. Il y a d’abord ceux qui réunissent facilement un grand nombre de joueurs, avec des règles très simples, comme Unanimo, Take it Easy, Dixit ou 6 qui prend. Ensuite, j’aime assez les jeux de connexion ou de pavage, soit sans aucun hasard comme Twixt ou le jeu de Y, soit avec une petite part de hasard, qui donne bien du piquant, comme Tayü. Tayü est probablement le jeu auquel je joue le plus, avec Dalapapa, bien sûr, mon bébé dont je ne me lasse pas. Enfin, j’aime beaucoup les jeux avec une forte interactivité, voire de la méchanceté, même s’ils présentent deux défauts : ma compagne refuse d’y jouer, et j’y perds systématiquement. Il y a assurément un ou deux jeux qui vont cartonner cette année. Je serais incapable de vous dire lesquels. Et même si je le savais, je ne vous livrerais pas cette information. Je la vendrais fort cher à un éditeur, afin de me payer enfin une petite île privée dans le Pacifique sud… avec un club de jeux à proximité, et une connexion Internet bien sûr !
Jeuxyannick remercie François Haffner pour sa participation à ce blog. N'hésitez pas à aller découvrir son site jeuxsoc.fr !