Découvrez tous les secrets de l'industrie des jeux de société en lisant ce livre !
J'aime bien me poser et tenter de dresser une analyse aussi fine que possible de ce secteur que je trouve à la fois passionnant mais également singulier à plusieurs titres. J'y reviendrai par la suite.
La question que j'aborde aujourd'hui est une question cruciale. Une question cruciale pour moi qui suis entrepreneur dans l'univers du Ludique, mais une question cruciale également pout tout ceux qui se lance dans la création d'une entreprise en lien avec l'univers des jeux de société.
Et je peux dire que j'en croise des entrepreneurs de ce calibre! C'est ca qui est passionnant avec le secteur des jeux de société : on ne soupconnerait pas, de prime abord, le nombre de personnes qui souhaitent monter leur projet, soit pour créer une boutique en dur, soit une boutique en ligne, soit un site d'informations, soit une maison d'édition. Il y a tous les profils de projets. Certaines personnes rêvent également de devenir auteur...
Comme tout secteur, pour bien le comprendre il faut avoir une vision fine de sa réalité économique. Sur ce point-là et avec un recul désormais suffisant, je suis en mesure de dire que je percois bien toutes les strates de valeur ajoutée des principaux maillons du Ludique.
La famille des jeux de société est très soudée. C'est ce qui fait sa force. Elle peut se montrer fort chaleureuse, comme également boudeuse. Rien d'exceptionnel. La réalité de la force de caractėre des acteurs en place n'y est pas étrangėre. Chacun défend l'image qu'il se fait de l'univers des jeux. Quitte à ne pas en démordre. C'est ce qui rend si vivant ce secteur ! Ce qui marque avant tout l'industrie des jeux de société, c'est la Passion. Et avec un grand P s'il vous plaît. Car j'ai beaucoup de respect pour l'énergie positive qui se dégage de ce secteur. Bon bien entendu lorsque je suis le témoin de discours ou attitudes chargées de mauvaise foi, c'est quelque chose qui m'horripile. Dans l'univers des jeux de société, mais comme dans tous les secteurs, ne soyons pas doux rêveur, cela existe aussi. L'univers des jeux autorise une vraie créativité et valorise l'innovation. Les meilleures mécaniques sont toujours plébiscitées par les passionnés.
Donc avoir une bonne vision des acteurs en place et des principaux maillons économiques, c'est essentiel. C'est la seule et unique manière de pouvoir se trouver son propre créneau et y évoluer sereinement. On peut dire aujourd'hui, sans trop se tromper, que la plus grosse partie des marges, rapportées au risque encouru, revient au maillon des distributeurs. Ce n'est absolument pas une surprise pour personne. L'essentiel du risque repose donc sur les éditeurs. Et c'est là toute la raison de mon article car je vois poindre clairement à l'horizon un problème qui se fera certainement ressentir de plus en plus dans les années à venir. D'où mon envie de saisir le clavier numérique de mon ipad pour le soulever au grand jour.
Comme tout secteur en croissance, certains acteurs tirent de bien meilleure maniėre leur épingle du jeu (pardonnez moi l'expression, lol!). Comme tout secteur, des schémas économiques se mettent en place : là en l'occurence il s'agit avant tout du systėme de dépôt-vente où les éditeurs font reposer le succės de leurs jeux sur les épaules d'un distributeur (qui en assure la vente) et espėrent que la force de son catalogue fera le reste. Comme tout secteur des schémas de dépendance se créent donc.
Je noterai que pour ma part, j'ai pu constater sur le terrain des besoins récurrents de la part des gérants de boutiques pour une bien meilleure information sur les jeux qu'on leur propose en catalogue. Or, justement, tous les schémas économiques tissés au fil des années dans l'industrie du Ludique ont semblent-ils amenés à une situation totalement paradoxale où les gérants ne savent finalement plus trop la qualité des mécaniques des jeux qu'ils achėtent. Ils se retrouvent avec un nombre de références en forte explosion sans vraiment que cela réponde à un besoin et coincés dans un schéma où leur gestion des stocks devient problématique. En bref, cela devient un vrai casse-tête pour eux au point qu'il peut leur arriver de ne commander des jeux que boîte par boîte, sans qu'il n'y ait plus la volonté d'instaurer un schéma économique qui viendrait en soutien de tel ou tel jeu et ainsi écouler de plus grosses quantités d'un coup. Un petit peu l'inverse de ce qu'on retrouve dans des réseaux de franchisés où les efforts portent sur les ventes de collections déterminées pensées avec une vraie logique à la fois vis à vis du consommateur mais également du réseau en place des points de vente.
Dans l'univers des jeux de société, ce qui prédomine désormais c'est la micro-commande. Moins je concentre mon risque, mieux je me porte, pourrait être l'adage. Et attendons de voir les premiers retours des ventes des nouveautés avant de me positionner. Il sera toujours temps de me positionner ensuite...Voilà un peu l'état d'esprit piégeux auquel a amené le schéma économique de ces derniėres années. Et pourtant les boutiques sont, et resteront, les principaux prescripteurs du marché des jeux de société. C'est grâce à elles que les succės se font. Ce sont elles le principal maillon à forte valeur ajoutée. Ce sont elles qui devraient porter le meilleur ratio marge par rapport à la prise de risque. Et d'ailleurs, ne souhaitant plus porter seules le risque commercial des lancements de produit, c'est la raison pour laquelle elles optent au final pour une réduction de leurs commandes au strict minimum.
En fait, il y a un élément que je trouve particuliėrement incompréhensible. Et cet élément c'est le rôle de sélection que ne joue pas forcément le maillon Distribution. C'est un élément moteur face auquel les gérants de boutique ont une vraie demande pour les aider justement dans leur quotidien. Et de par la structure actuelle, ce besoin n'est clairement pas satisfait. Il y a clairement un problėme et sans ce nouveau rôle qui va devoir s'imposer aux distributeurs, le marché des jeux de société aura du mal à connaître le rayonnement qu'il mérite. Une multiplication du nombre de références sans l'accompagnement d'un vrai rôle sélectif, cela amėne logiquement à un nombre grandissant de jeux qui végėtent à moins de 3000 unités vendues et qui n'ont alors aucune chance d'être repérés par le grand public.
Car tout l'enjeu dans l'univers du Ludique c'est justement d'oeuvrer pour donner plus de visibilité aux bons jeux et de les défendre lors de leurs deux premiėres années d'exploitation commerciale pour qu'ils parviennent au seuil critique des 10 000 unités vendues qui permet au jeu de sortir du cerle des passionnés et d'accéder à un public plus large et plus grand public.
Multiplier les sorties et renouveler trop souvent son catalogue, c'est un piėge économique. D'autres secteurs ne s'en sont pas remis, comme la musique par exemple. Et c'est la raison pour laquelle j'insiste sur le maillon Sélection, qui n'existe actuellement pas concrėtement et qui va devoir s'imposer dans les mois et années à venir, en réponse au nombre grandissant de nouvelles références.
Et par sélection, j'entends inclure les joueurs d'une maniėre plus importantes qu'ils ne le sont actuellement. Certes, ils ont désormais l'avantage de bénéficier maintenant plus largement de vidéos de présentation de bloggueurs passionnés et indépendants. C'est une belle avancée dans ce rôle de prescription qui manque actuellement à l'un des maillons de l'industrie des jeux de société. Tout le monde se connaissant personnellement, il devient de plus en plus difficile de voir des avis indépendants tranchés et constructifs. Et pourtant la critique est constructive en soi. Elle permet de repérer plus rapidement les véritables pépites ludiques. Combien de fois, et encore récemment, j'ai pu observer des consensus se former autour de jeux qui pourtant ne se révėlent clairement pas être à la hauteur de tout ce qui en avait été écrit dessus. Je trouve cela étrange et je n'en vois pas vraiment la valeur ajoutée car au final cela ne fera pas de ces jeux un carton commercial pour autant. Car c'est la réalité du terrain dans les boutiques qui l'emporte toujours. Et au passage, le gérant de boutique ne peut qu'être renforcé dans sa logique de protection et de commande a minima sur chaque jeu, aucun maillon ne jouant actuellement le rôle indépendant de prescription auquel ils s'attendent et aimeraient voir émerger.
On arrive donc à la conclusion de mon article qui explique en grande partie pourquoi l'univers des jeux de société se devra de changer si ils veut devenir un produit tendance recherché par le grand public. Car à vouloir fonctionner comme une niche, des biais sont apparus et ces biais-là sont un frein qu'il faudra lever pour donner tout son plein potentiel à ce secteur disposant de véritables filons de pépites non-exploitées. Et c'est l'acteur qui saura proposer le filtre adéquat de sélection (répondant aux besoins du terrain, à savoir les boutiques) qui tirera son épingle du jeu. La situation actuelle va donc évoluer et c'est alors que l'univers des jeux de société pourra révéler ses plus belles merveilles à un public suffisamment large et diversifié pour le rendre tendance et indispensable à toute bonne soirée entre amis réussie et recherchée.